Bon, rien d’exceptionnel, avec Anna on habite à Port-Louis. Ya plein de monde qui n’aime pas trop cette ville, mais moi j’aime bien. Et du coup, pour vous montrer pourquoi je vous propose de vous emmener avec moi au cœur de la tourmente, dans ma sortie presque quotidienne dans le centre-ville.
Lundi 14 mars. Aujourd’hui, il faut que j’aille acheter des œufs. Ca fait au moins une semaine que je dois le faire, mais j’oublie à chaque fois. Ce matin, Anna m’a réveillé à 7h en partant travailler. J’ai avalé un petit dej à base de pain, de beurre de cacahuète et de confiture de banane maison (et oui m’sieurs dames, de la confiture maison). Et enfin j’ai passé la matinée, dorloté par le ventilateur, à faire du montage pour un podcast fabuleux dont je parlerais peut être un jour ici.
Vers 13h, poussé par la faim et la chaleur de la journée, je lève enfin mes fesses de la chaise, attrape mes savates et c’est parti. J’ai mille roupies (20€) dans pour petit porte-monnaie « le routard ». Ca suffira amplement.
Dehors, il fait chaud. Il suffit de marcher quelques minutes en plein soleil pour sentir quelques gouttes de sueur se frayer un chemin dans mon dos. Mais je ne fais plus attention, je suis habitué. De même pour le masque, qui m’étouffait pourtant au début du séjour. Il y a le bruit aussi. Le silence n’existe pas à Port-Louis. Il y a toujours des motos, des voitures, des klaxons, des bruits d’enfants dans le collège à côté de la maison. Quand je m’approche du centre, j’entend aussi les vendeurs, qui gueulent des promotions incompréhensibles en créole.
Je pensais trouver un vendeur de rotis dans la rue, mais j’arrive bredouille devant le bazar. Tant mieux, les rotis du bazar sont délicieux. En traversant ledit bazar, je repère un prix intéressant sur les fruits de la passion. Je repasserais après manger. Je prends deux rotis pour 30Rs et un verre d’alouda glacé (une boisson à base de lait) pour 30 Rs aussi. Top ! Je gobe ça en même pas une minute, je crois que j’ai mangé trop vite. C’est dommage de ne pas apprécier plus que ça, c’est vraiment bon. Tant pis, je prendrais plus de temps la prochaine fois.
Allez, tant que je suis là, je vais acheter deux trois trucs. Hop, je crois qu’on a plus trop d’oignons, je vais en prendre une livre pour 20Rs. Tiens, le vendeur vend aussi des avocats. Les avocats Mauriciens sont pas top, mais je pourrais faire une petite salade avec. Allez, trois avocats bien mûrs pour 100Rs. Tiens, juste à côté ils font le fruit à pain pour 40Rs, c’est pas cher, allez j’en prend un.
Bon, mais ne nous égarons pas, je suis juste là pour acheter des oeufs moi. Le problème, c’est qu’y a pas d’oeufs au bazar, même pas au bazar viande. L’autre jour, j’ai pris mon courage à deux mains pour braver l’odeur infecte et le carrelage glissant de la partie « volaille » et le mec m’a assuré qu’il n’y avait pas d’oeufs ici. Maiiis je crois bien que je peux trouver des oeufs dans le quartier chinois. Tiens, j’ai qu’à passer au bazar de la gare, ya toujours des bonnes affaires là bas !
Sur la route, je dois passer par une petite rue dont j’ignore le nom. Je pense que c’est la rue la plus animée de la ville. Il y a tellement de marchands sur les trottoirs et la route que les voitures peuvent à peine circuler. Les crieurs y vont franco, je comprend rarement leurs annonces.
Pour arriver au bazar de la gare, je dois justement traverser la gare. C’est la grosse gare routière de Port-Louis depuis qu’ils ont pété l’autre pour mettre un tramway. Il y a des dizaines de bus antiques qui manœuvrent, et s’entremêlent, en évitant les piétons et les trottoirs de justesse et en klaxonnant au moindre doute. Je trouve ça incroyable comment un tel bordel semble ne jamais générer aucun accident. C’est presque organique : chacun fait ce qu’il a à faire et tout se passe bien comme dans un banc de poisson ou un troupeau d’oiseau (on peut dire troupeau d’oiseaux ?). Le long de la gare, ya aussi plein de vendeurs de trucs en tout genre : mort aux rats, piles, boites en plastiques, etc. Je ne suis pas leur meilleur client.
Enfin j’arrive au bazar de la gare. Tiens, je vois des légumes que je connais pas. Ca ressemble à un mélange entre une courge et un concombre. Une cliente me dit que c’est bon en fricassée avec de la viande et de l’oignon. J’en prend un peu pour essayer. Ya aussi les vendeurs de fruits. Je leur prend quelques mangues, certainement les dernières de la saison, et des jattes. Mon sac est bien rempli, mais pas mon ventre, j’ai un petit creu.
Ca tombe bien, ya un petit snack chinois de l’autre côté de la route. L’endroit est tenu par un vieux chinois à l’air constamment un peu perdu et avec un accent à couper au couteau. C’est étrange d’ailleurs, l’immigration chinoise est vieille, je n’ai jamais entendu un Mauricien parler avec un tel accent. Encore un fois, je comprends que dalle quand il parle. Je commande un bol de boulettes et une chopine de coca, pour la soif.
Les boulettes, c’est cool. Et en plus avec le bouillon, je m’hydrate un peu et évite le mal de crane. Le mal de crane arrive bien vite quand on oublie de boire ici.
Repus, je rentre satisfait à la maison et je range mon butin au frigo. Je m’assois lourdement pour boire un grand verre d’eau fraîche. Merde, j’ai encore oublié les œufs.