Bon alors cet article parle religion, et plus particulièrement Hindouisme. Le problème c’est que je suis pas très calé en religion et encore moins en hindouisme. En fait, quand on commence à creuse un peu, l’hidouisme c’est carrément compliqué. C’est très vieux, ya plein de dieux, plein de branches, plein de clergés, plein de dogmes, plein de textes sacrés, chaque dieux a plein de noms, plein de réincarnations, plein de symboles et plein de significations, bref c’est compliqué.
C’est quoi Maha Shivaratri ?
Mais en gros, ya trois dieux majeurs dans l’hindouisme : Shiva, Vishnou et Brahma. Et Maha Shivaratri, c’est la grande nuit de Shiva. En fait, apparemment certaines branches de l’hindouisme considèrent Shiva comme un Dieu unique, et les autres dieux sont d’autres formes de Shiva. Et j’ai l’impression que cette branche est assez populaire dans le sud de l’Inde, d’où vient la majorité des hindous Mauriciens. Mais bon, c’est beaucoup de supposition là quand même.
Maha Shivaratri est la fête religieuse la plus importante à Maurice parce qu’il y a beaucoup d’hindous et qu’ils font des trucs visibles/impressionnants. Le principe c’est de faire un pèlerinage à Grand Bassin, ou Ganga Talao, le lac sacré de Maurice, qui aurait la même eau sacrée que celle du Gange. Bon, Maurice c’est pas très grand alors chacun part de sa maison. Les plus courageux marchent dans les 70/80km aller puis retour. Mais comme c’est un peu simple, on ajoute les Kanwa, c’est des genre de char de Carnaval, mais portés par les pèlerins. Ils sont très colorés, c’est vraiment joli. On ajoute aussi de la musique, souvent des mantras remixés. Je vous met un exemple ici :
Ces joyeuses musiques sont propulsées depuis des carbass surpuissants qui roulent au pas pour motiver les pèlerins. Et pas seulement à Grand Bassin, mais sur tous les grands axes routiers de l’île, puisque c’est un pèlerinage ! Et le tout, pendant les 2 semaine qui précèdent la grande nuit de Shiva (les pèlerinages sont étalés sur 2 semaines pour éviter les grand rassemblements, covid toussatoussa.
Mon pélerinage
Bon, c’était une bonne occasion de voir du pays, alors j’ai décidé de faire mon pèlerinage aussi. j’ai pris un kway, 4L d’eau, des barres de céréales et mes savates de marche et je suis partis à 18h de Moka pour un peu plus de 30km de marche. Les gens font plutôt le pèlerinage la nuit parce qu’il fait trop chaud le jour. Et puis bon, c’est quand même la nuit de Shiva.
Je suis parti deux jours avant la vraie grande nuit de Shiva, mais bon osef parce que comme je l’ai déjà dit, le pèlerinage est étalé sur deux semaine, on peut donc le faire quand on veut pendant ces deux semaine.
Je commence donc à marcher une heure avant le coucher du soleil. Il fait déjà moins chaud et je traverse les rivières entre Moka et Ébène. On est dans une zone très urbanisée, mais les rivières ont creusé des profondes gorges remplies de jungle, c’est très joli.
S’ensuit la traversé de la grande aire urbaine de Quatre Bornes. La nuit tombe très vite ici, en 30 minutes on passe du jour à la nuit noire. Je passe de lotissements riches à quartiers pas vraiment riches à quartier carrément pauvre.
Et enfin, je sors de la ville et je commence à naviguer dans des chemins de champs de canne. J’aime beaucoup l’ambiance ultra calme des champs de canne la nuit et le beau ciel étoilé de l’hémisphère sud. Mais je commence aussi à me rendre compte que mon itinéraire, calculé par une appli de rando, ne me fera pas passé par les grands axes routiers, où sont tous les pèlerins. Pas grave, je suis bien ici.
Toutefois, je suis sur mes gardes, surtout quand je passe proche d’habitations isolées. Je n’ai toujours pas peur des gens, malgré les mises en garde des Mauriciens à mon égard, mais j’ai peur des chiens. Je me suis déjà fait mordre deux fois depuis le début du voyage. Rien de grave à chaque fois, mais le contact des canines de ces putes de clebs sur ma peau m’a laissé une forte impression. Je fais beaucoup plus attention maintenant. D’ailleurs, j’ai pris mon couteau Mora au cas où j’ai l’occasion de planter une de ces saloperies. En fait, les chiens errants sont très rarement un problème, surtout si ils sont seuls ou sur un lieu de passage. Le problème, c’est quand ils estiment qu’ils sont sur leur territoire, par exemple une maison sans clôture c’est un problème. Un autre problème, c’est quand les chiens errants forment une meute. Bref, c’est relou.
Après les champs de canne, le chemin arrive dans une forêt. Au début, j’aime bien puis la forêt devient très glauque. Il y a des ruines et des arbres crochus avec dedans des chauves-souris qui couinent et se déplacent de branche en branche, un peu comme des singes. Le chemin est très humide, j’ai les pieds pleins de boue. Je ne croise personne.
Finalement, vers 00h30, j’arrive enfin sur la route et je vois les autres pèlerins. En fait, il y a pas mal de monde ! Les gens viennent en famille, entre amis et marchent toute la nuit pour faire l’aller-retour. C’est vraiment étonnant de voir tout ce monde dans la nuit quand on sait à quel point les Mauriciens ne sont pas nocturnes. Il y a pas mal de voitures décorées avec de la musique, qui passent doucement pour motiver tout le monde. Encore une chose, à cause du covid cette année, il est interdit de donner de la nourriture et de l’eau aux pèlerins, comme le veut la coutume. J’imagine que ça doit être beaucoup animé en tant normal.
Vers 2h du matin, j’arrive enfin à Grand Bassin. Sur le parking devant les statues géantes de Shiva et Durga, j’entends de la techno. Pourquoi pas ?
Dans le lac sacré et dans les temples, les pèlerins font des offrances, des abblutions et brulent de l’encens et du camphre. Il y a du vent, il fait frais et surtout très humide. En fait, malgré l’ambiance magique et hors du temps de l’endroit sacré, j’ai du mal à entrer dans l’ambiance. D’abord, ça pu. En fait, les offrandes de nourritures sont repechées dans le lacs et ramassées sur les autels par des éboueurs qui les stockent sur place dans ce grand sac poubelle jaune fluo. De la bouffe trempée dans un sac poubelle, et bien ça schlingue et plus d’être moche. De plus, les éboueurs n’ont accès à aucune infrastructure : ils somnolent, comme certains pèlerins, sur les bords trempés du lac sacré. D’ailleurs, le lac sacré est entourné de marches qui permettent de descendre un peu dans l’eau pour faire les ablutions et les offrandes, mais pour éviter les accidents, la police à mis des barrières moches et de la rubalise jaune fluo tout le long du lac pour pas que les gens aillent trop loin. C’est certainement pratique, mais extrêmement moche.
D’ailleurs, pour rester sur les aspects négatifs, je suis frappé par le manque d’infrastructures en général. Il n’y a pas d’eau potable, pas de nourriture, pas d’endroit où dormir et seulement quelques toilettes assez misérables. Bon, d’un autre côté, ça colle avec l’idée de dénuement du pèlerinage. D’autant plus que les pèlerins sont sensés veiller pendant leur nuit à Ganga Talao. Mais quand même, je vois des pèlerins dormir par terre, emmitouflés dans des couvertures et des imperméables, c’est à la dur.
Je vois également des processions de tambour et de Kanwa. Ca ajoute à l’aspect irréel de la nuit. C’est bizarre de voir tous ces gens actifs la nuit alors que d’habitude, la nuit Mauricienne est extrêmement calme. Les gens s’activent, passent de temple en temple, font sonner les cloches, mettent de la musique, mangent, fument, discutent, se reposent, se massent les pieds et les jambes endolories… Bref, chacun sait ce qu’il a à faire.
Finalement, je monte sur la colline au dessus du lac sacré. Ici, il n’y a pas grand monde et la vue est magique. Dans l’escalier pour descendre, je vois 2 pèlerins qui dormes sur les larges marches de pierre. Je suis crevé, je décide d’en faire autant. Je m’enroule comme je peux dans mon hamac et mon kway et je commence une nuit froide, dure et courte.
Au petit matin, je remonte au sommet de la colline pour admirer le lever de soleil. Au loin, on voit presque toute l’île : la grande agglomération Curepipe-Vacoa-4Bornes, les montagnes et les champs de canne et surtout la mer de chaque côté. De l’autre côté, on voit la forêt du parc national s’étaler sur plusieurs km. J’ai l’impression d’avoir le monde entier sous mes yeux. Un petit monde certes, mais un monde quand même.
Finalement, je marche encore 6km jusqu’à bois Chéri et je rentre dans la matinée à Port-Louis. J’ai mal aux jambes et je suis fatigué, mais content quand même d’avoir vu ça.