Réveil vers 8h après une nuit plutôt mauvaise ou j’ai pas vraiment trouvé le sommeil. Je repense à l’accident, à comment va se passer la suite, comment je m’arrange, que ce soit pour Jules pour qu’il ai des indemnisations ou que ce soit pour la moto.
Bref, petit dej avec du riz, de la semoule et jsplus quoi, j’ai mangé quoi, je sais plus quoi. On part ensuite dans le champ de café et on récolte pendant 3h30. De retour à midi, soupe de pâtes. Ils regardent la moto, un ami de Victor est venu voir ce qu’elle a. Moi je chill un peu, je devrais écrire mais je ne le fais pas. J’en ai marre d’écrire en vrai, ça devient vraiment une corvée alors que c’était un plaisir avant. Après 250jours, vraiment, j’en ai marre. Après bon, tout le monde m’avait prédit que j’écrirai 20j pas plus, c’est déjà bien haha. Je vais me forcer à écrire jusqu’à la fin mais c’est vrai que ça me gave des fois. À la place on se fait un appel visio avec Fiorella (la Colombienne qui étudie en France là). Ils repartent dans le champs sans que je les ai vu, je les rejoins juste après. On cueille pendant de nouveau 3h. À la fin j’en ai marre. Pas que ce soit fatiguant mais c’est du travail à la chaîne quoi, c’est pas intéressant. Oscar l’ouvrier et Victor discutent mais je comprend pas tout avec leur accent. J’ai essayé de parler avec Maria mais c’est compliqué, Víctor me dira plus tard qu’elle est timide parceque je suis étranger.
Je me pose un petit moment avant de descendre. La vue est vraiment belle, des petits perroquets verts passent dans le ciel en chantant, les montagnes sont superbes. Bientôt tout se fait recouvrir par les nuages et je part.
Arrivé en bas on mange des tortillas frites. C’est comme des tortillas, mais frites. De l’eau et de la farine, le tout frit. Voilà, c’est tout. J’avoue que c’est pas ouf comme repas haha, on a vu mieux. Après ça je vais avec Victor m’occuper du café récolté, il faut séparer le grain de sa pulpe (la partie rouge). Víctor démarre son vieux moteur et tend la courroie : la râpe à fromage géante de met en marche. Il verse ensuite sauts sur sauts dans la machine branlante abîmée par les années. D’un côté sortent les écorces qui serviront à fertiliser les sols, de l’autre les grains de café. On met ensemble seau sur seau dans la machine pour un total d’environ 4 sacs de 50 kgs.
On rentre, ses enfants font leurs devoirs et on discute du café.
Il m’explique que le café a besoin de 5 choses : odeur, arôme, acidité, corps et poid, auquel on peut ajouter un bonus s’il a un goût de fruit. La café Colombien qui est tant sollicité est en fait de basse qualité. Il produit beaucoup et n’ai pas top. Idem pour le café Brésilien. Les meilleurs cafés sont Péruviens, Éthiopiens et Turques. Si le café Colombien est si connu c’est juste du marketing, et le fait des colons qui se sont installés et ont monté des fincas en Colombie alors qu’ici ce sont des gens qui sont plus proches des indigènes. Les premiers producteurs de café sont le Brésil, la Bolivie et la Colombie. Il m’explique qu’en réalité pour avoir les 5 éléments du café et obtenir un bon café il faut un peu de toutes les espèces.
Lui il vend son café au grenier pour 1000 soles les 50kgs soit 250€ les 50kgs donc 5€/kg. Suite à ça le café part pour Jaén puis Bagua et enfin Chiclayo pour l’export. Jaén c’est la capitale de la région, Bagua c’est parcequ’il y a une entreprise de lavage et trie des grains. Ils enlèvent la peau du grain, le lustre et le trie : les beaux grains pleins pour USA et Europe, les petits cassé pour le Chili et USA à prix cassé et la peau pour les animaux en Équateur. Je lui demande pourquoi ils ne font pas une coopérative comme ils font pour le chocolat. Il me dit que dans les coopératives ce sont tous des profiteurs. Ils achètent le grain 1000 soles mais le vendent 2500 soles. En fait la différence c’est pour les dirigeants de la coopérative. Et c’est toujours comme ça.
Le souci c’est que les coopératives sont en accords et que si ils veulent les court-circuiter il faut 2 choses complexes : trouver un acheteur en Europe, et surtout, payer le transport en avance. En fait, le transporteur demande de régler sous 30j les frais mais livre en 90j. Il faut donc avancer les frais ou que le client les avance. Le client, ne connaissant pas Victor et ses potes, ne va pas avancer les frais. Ainsi c’est à eux de les avancer. Sauf qu’ils n’ont pas d’argent d’avance, donc ils ne peuvent pas. Victor a essayé en 2006 de monter une association et de se mettre ensemble pour court circuiter et gagner plus. Ils avaient une grosse commande et 20 agriculteurs ont mis toutes leurs récolte dans cette commande. 1000 sacs de 50kgs, 50Tonnes de café donc. Tout marchait bien… Ils ont même réussis à trouver les sous pour le transport… Et le jour de réunion où tout le monde devait apporter son café, un mec manque à l’appel. Il ne viendra jamais. Ce con a tout fait foirer, il manque 50 sacs. Le souci c’est que Victor et ses amis n’ont pas de rab de café et ne peuvent pas compléter. Ils n’ont pas les économies suffisantes non plus pour acheter ce qu’il manque. Vente annulée, retour case départ, pas de création de l’association. Putain ça a dû les rendre fou. Tout ça pour un putain de mec qui se pointe pas. Il a réessayé ensuite mais les gens ont refusé de se réinvestir dans le projet en disant qu’il y aurait toujours qqun qui manquerai à l’appel.
Autre chose : le café que fait Victor est bio, ce qui n’ai pas le cas de tous. Le souci c’est qu’il n’est pas reconnu comme bio parce qu’il faut une certification. Cette dernière est délivrée par une entreprise Colombienne qui la facture 14 000 soles (3500€). Évidemment Víctor n’a pas les moyens, du coup il n’est pas reconnu. Il m’explique autre chose d’intéressant : la certification ne se fait pas à l’échelle d’une finca mais de toute une association quand il y en a une. Et ce, même si tout le monde n’est pas bio. Il m’a dit avoir été bien engagé dans une autre association et qu’il a vu comment ça marchait. Il y avait 50 agriculteurs dont 10 bios. Les Colombiens sont arrivés et ont demandé qui était RÉELLEMENT bio. Il a donc donné la liste des 10. Les Colombiens voulaient ensuite les 4 meilleurs. Victor a donné leur nom. Les Colombiens sont alors allés voir les 4 et ont certifié toute l’association comme produisant du café bio. Et si l’un des 4 ne fait finalement plus du bio et qu’il y a un contrôle ? On prend le gars demandé et on le fait présenter la finca de quelqu’un d’autre en bio en disant que c’est la sienne et le tour est joué. Le bio en terme de café n’a donc aucune valeur.
Víctor produit 50 sacs de 50kgs par an, qu’il vend 1000 soles le sac. C’est la production d’une Finca moyenne. 50 000 soles ça fait 12 000€ donc un salaire de 1000€/mois. Ça me paraît énorme, 4 fois le salaire minimum, je demanderai demain mais il y a des coûts dont je ne dois pas connaître l’existence. Edit : en fait 80% des gains partent dans l’entretien, il lui reste donc 1000 soles par mois (250€) soit le salaire minimum.
Bilan : 0€