Le voyage de Marty, Tacacoma-nowhere #jour345

Réveil et petit dej sur notre montagne. La vue est spectaculaire, comme tous les jours dans ces montagnes. Je prend Guillaume avec moi aujourd’hui. On perd moins de temps à caler les sacs, j’ai appris grâce à hier.

On démarre, on roule, on descend. On prend une route secondaire pour gagner du temps et au final on en perd car je rate la sortie. Bon. En même temps elle est vraiment faite bizarrement cette route. Bref. On roule, on descend, on descend, on monte sur le dernier sommet, puis on redescend. On voit le village qui est en bas de loin, Léo y est déjà. Le temps qu’on arrive il est déjà reparti. En fait il était parti aux aurores ce matin, il avait envie de marcher fort et seul. Ils font bruler le champs à côté de la route pour les prochaines plantations sauf que c’est l’enfer : toute la fumée vient sur la piste. Je ralentis et essaie d’avancer les yeux plissés. Je n’y vois pas à plus de 2m et la fumée me brûle les yeux. Je m’arrête, je n’en peux plus, impossible de respirer, de regarder devant, j’ai bien cru qu’on finissait dans le talus. Guillaume me dit « allez mec plus que 5m ». Je regarde alors devant et effectivement, on était à 5m de la fin haha ! je repars donc et on sort de cette merde, je fais une petite pause pour me remettre d’aplomb. On termine la descente et on arrive au village de Pallayunga.

Ce village, c’est le far west. Aucune âme qui vive, un air extrêmement sec, de la poussière partout, du vent et même des buissons en boule qui traversent la place principale. C’est littéralement le far west ! Je ne sais pas où sont les habitants ni dans quoi ils travaillent : il n’y a rien ni personne ici. On trouve le seul comedor et on y mange. Des pommes de terre à la huancaina si je ne dis pas de bêtises, avec un verre ou deux de jus de maracuya.

Après le repas rapide on repart : direction Mapiri. Avec un peu de chance on peut y arriver. On repart mais les 5 premiers kms sont compliqués à cause du vent : il y en a tellement que je roule lentement, les bourrasques sont si fortes qu’elles remettent en question mon équilibre, c’est dire. On roule mais plus on avance plus la route devient compliquée : elle change radicalement. Alors qu’avant c’était une piste de montagne avec de la terre sèche entourée de zones arides, c’est désormais une nature de plus en plus luxuriante. Des arbres de tous côtés et un piste sèche qui devient boueuse par endroits. Et plus on s’enfonce et plus on est réellement dans la jungle. Mapiri c’est la jungle, on le savait, mais le changement de flore est impressionnant. On passe du rien au tout. Au début 2-3 arbres, c’est maintenant une vraie jungle. On y arrive, doucement mais surement, surtout dans les zones de boue. Un village, Conzata, on s’arrête. J’en fait le tour pour trouver de l’huile pour la chaine de la moto : introuvable en moins que bidon de 1L. Ou alors de l’huile usée et noire ! Bon au final le garagiste nous fait cadeau d’un peu d’huile correcte et on discute avec lui et un passant. La discussion est cool, on repart.

Apparté : Je ne le savais pas encore à ce moment là mais en Bolivie ils ne mettent jamais d’huile neuve pour graisser : toujours de l’huile de moteur usagée. C’est moins cher, oui, assurément, mais enfin, c’est quand même vraiment pas recommandé !

Apparté 2 : faire de la moto à deux avec les sacs c’est super instable en montée : la roue avant n’a plus aucune adhérence dès qu’il y a une bosse car elle se lève. Il faut donc anticiper les fortes montées et surtout les irrégularités de la piste pour que quand on passe dessus, la moto soit bien droite et dans la bonne direction. Avec Guillaume derrière + les sacs, en pente, tout le poids est à l’arrière. Je lui demande donc de se coller à moi mais c’est pas toujours suffisant. La moto de base fait 125kgs, moi 65, guillaume 70, les sacs 25. Soit un total de bagages de 160kgs sur un moto de 125kgs. On comprend mieux pourquoi à deux c’est parfois un peu juste.

On continue la route. Je parlais de jungle n’est ce pas ? à partir de ce village il y a des cascades et des ruisseaux à chaque virage intérieur dans la montagne. Depuis Achacachi à Mapiri ce ne sont que des montagnes, avec le sommet à la lagune de Chillata (4200m) et le point le plus bas à Mapiri (600m). On ne roule donc que sur des pistes à flanc de montagne, parfois plus ou moins périlleuses. Plus maintenant que nous sommes en fond de vallée mais avant oui. J’adore cette nature, que j’ai déjà découvert au Sud Mexique et Nord Guatemala mais cela ne m’empêche pas de toujours l’adorer. Guillaume est émerveillé. On s’arrête à deux trois spots pour en profiter un peu plus. Cette nature me redonne la pêche instantanément ! C’est impressionnant. Les montagnes des 3 derniers mois au Pérou et la piste compliquée commençaient à me peser et là en 10min j’ai retrouvé suffisamment d’énergie pour faire le tour du monde ! Je suis moi même surpris de l’effet que cela me fait.

Bref, beaucoup de cascades et de rivières. En voiture aucun souci mais en moto il faut faire super attention : je n’ai que deux roues, un équilibre relatif et encore plus dans l’eau sur des galets. A chaque fois Guillaume descend, je passe, il remonte, on repart. Au bout de 10 rivières qui se passent sans encombre, je dis à Guillaume de rester avec moi, c’est bon, on va pas y passer notre vie non plus ! On passe 2-3 cascades de plus sans souci. Je prend un peu trop la confiance et sur cette dernière cascade on se vautre tous les deux. A la toute fin de la rivière, un caillou bien plat et plus grand que les autres. On est deux sur la moto, l’équilibre est encore plus instable, la moto glisse sur la roue avant, impossible de la rattraper. On finit par terre. Je ne l’ai absolument pas vu venir et je me prend une grosse montée d’adrénaline. Guillaume n’a rien. Moi j’ai mal à la main : en tombant je me suis retenu sur la paume, je ne peux plus vraiment bouger le pouce. Je regarde , rien de grave, c’est le choc, je bouge correctement, juste que ca me fait mal. Pour la moto : la poignée de frein avant est cassée ainsi que les deux rétros. Oui, les deux rétros. C’est à dire qu’avec le choc (qui correspond à une moto qui tombe alors qu’elle est à l’arrêt) le rétro de gauche s’est aussi cassé. Vraiment de la bonne qualité dis donc ! Tant pis. Les rétros sont inutiles ici par contre le frein avant un peu (mais bon, vu qu’il est nul…). On fait 5 min de pause le temps que je reprenne mes esprits. On repart, on fait 5kms puis on retrouve Léo sur le bord de la route.

Discussion tous les 3 : Léo marche depuis 3h sans que personne ne le prenne. Alexis et PY sont au village de ce midi ou la où on a mis l’huile je ne sais plus. Guillaume est partisan de continuer tous les deux, je refuse. On aura pas le temps d’arriver à Santa Rosa avant la nuit, il nous faut 2h minimum et le soleil se couche dans 1h. En plus on a roulé 5-6h aujourd’hui, je suis crevé, je n’ai plus de frein avant et on est tombé il y a 20min, je ne me sens pas du tout de rouler. On décide donc de se poser ici tranquille et de camper sur le bord de la route. On parle de demain. Bon, demain, on arrive à Mapiri, c’est sur et certain. Guillaume veut revenir avec moi mais je ne suis pas chaud. Je vais faire cette dernière journée seul. Je ne le sens pas, j’ai besoin d’être un peu solo. Faire de la moto à deux c’est super sympa pour partager le moment mais en tant que pilote c’est épuisant. La moto est bien plus lourde, l’équilibre est précaire, c’est beaucoup plus exigeant, surtout sur ces routes compliquées.

Je range la moto un peu mieux, on pose les affaires et ils vont dans le prochain virage intérieur qui contient très certainement une cascade et une rivière. Je ne les rejoins pas tout de suite : je suis encore sous adrénaline, fatigué et je ne me sens pas super bien par rapport à ce qu’il vient de se passer. Évidemment c’est lié à l’accident avec Jules qui ressort. Je me dit qu’on a rien eu mais que ça aurait pu être pire car on est tombés du bon côté : côté cascade. De l’autre c’était pas le vide, mais une belle chute dans les pierres en contrebas quand même. Solo je m’en fou mais le fait d’avoir Guillaume avec moi c’est différent.

Je lui en ai parlé, il m’a dit que pour lui il n’y avait aucun souci, on est vraiment tombés à l’arrêt, pas de blessure, il me fait entièrement confiance et il trouve même que je conduis super bien compte tenu de la complexité de la piste et l’instabilité de la moto à deux dessus. Ca fait quand même plaisir haha.

Je les rejoins dans la cascade et on prend une douche bien méritée. Ca rafraichi, ca apaise, ca détend, ca va mieux. On se pose tous les trois sur une dalle de béton avec une magnifique vue sur la vallée et on mange en discutant. Ici il fait chaud, on est bien, c’est agréable. Rien à voir avec les montagnes. Ca me fait super plaisir. Voici Guillaume le Conquérant, roi de la jungle de Mapiri, régnant sur sa cascade :

J’ai absolument a-do-ré partager ces moments et ces galères avec les deux compères, c’était vraiment génial. Et je crois que les deux ont vraiment apprécié aussi. Un excellent souvenir. Avec Guillaume j’ai aussi fait 70 kms mais en plus de temps, je dirais 5/6h. Le truc c’est qu’en montagne je roulais à 20-30km/h mais dans la jungle c’est plutôt 10-15km/h. Depuis qu’on est dans la partie jungle, les seuls véhicules rencontrés sont des chercheurs d’or. D’ailleurs, il y a une mine juste en contrebas de là où on campe. On ne va pas la voir car c’est 200m de D- et ensuite il faudra remonter. On aura d’autres opportunités.

Bilan : 19Bs soit 3€

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