Le voyage de Marty, Trigana #jour220

Bon, je me lève à 5h30 pour aller pêcher. Le gars m’a dit de venir entre 5h40 et 6h, j’arrive à 5h45 mais tranquille, il m’a dit plus vers 6h. En réalité je les vois partir à 5h40 et 5h44. J’ai grave les boules. Demi tour et sieste. Réveil à 7h pour aller les voir rentrer. Je ne vois qu’un bateau sur les deux mais quels poissons ! Ce sont des Robalo, ils pèsent environ 6kgs et il y en a 6. Ça fait donc 36kgs de poisson qu’ils vendent 5€ le kilo soit 180€ la partie de pêche. La pêche c’est 1h de travail le soir pour aller en mer et poser le filet puis 2h le matin pour retirer le filet et vendre les poissons. Disont 4h en tout, pour 2 personnes. Ça fait donc 90€/personne pour 4h de travail ! Rentable ! Surtout sachant que le salaire minimum ici c’est entre 200 et 500€ et qu’un ingénieur en début de carrière gagne 600€ pour 40-50h/semaine !

Ils se baladent tous en moto Yamaha enduro 250cm3. En Colombie je n’avais jamais vu plus de 200 ! En plus elles sont flambant neuves, je ne comprenais pas comment. Maintenant que je sais cb ils gagnent grâce à la pêche tout s’explique. Ils gagnent très correctement leur vie et n’ont aucun poste de dépense outre la bière, il n’y a rien ici.

Je vais me recoucher refaire une sieste. Après ça, je range mon matos et pose mon sac comme je l’avais fait la dernière fois dans le jardin de l’hôtel principal. C’est safe, personne vole rien ici c’est tranquille. Je me pose sur la chaise/fauteuil que j’adore et relis ce que Manue a écrit sur moi et réfléchis.

Ce qui l’a marqué en premier chez moi ce sont mes yeux « vert foudroyant » et l’énergie que dégage mon regard. J’ai vrmt les yeux si incroyables ? En vrai c’est le soleil, elle va être déçue quand on va se revoir en France 🥲 ceci étant, ça me touche pour le regard parceque c’est quelque-chose de super important pour moi chez les autre, c’est quelque-chose que je regarde et que j’adore quand j’en vois un, donc ça me fait plaisir. J’aimerais beaucoup pouvoir voir mes yeux et mon regard de l’extérieur mais c’est pas possible 🤷‍♂️ triste vie haha 🥲

Elle voit ma façon de voyager qu’elle trouve fascinante et remet en question sa propre façon de voyager. Mais en réalité, sa façon à elle de voyager m’a fait remettre en question la mienne aussi ! C’est la première fois, et ça aussi c’est « fascinant » haha ! Elle voyage beaucoup plus tranquillement que moi, elle est arrivée il y a 2 mois et a passé 1 mois en volontariat quelque part. Souvent je suis sceptique des volontariats comme ça, je trouve que ça fait passer à côté du reste un peu. Mais pas de la façon dont Manue le fait. Elle a appris l’espagnol tous les matins pendant un mois (et avec ça déjà, elle gagne beaucoup dans mon estime, très peu de gens le font alors que c’est génial). Elle voyage comme je serais incapable de le faire actuellement. C’est la première fois de mon voyage que je vois quelqu’un qui voyage vraiment différemment de moi et qui m’intéresse autant. Les autres gens avec qui j’avais bien discuté ce sont les français a Urrao ou Olivier au Mexique, qui voyagent en tente à l’arrache. Et c’est super cool de voir autre chose, ça me fait réfléchir.

Peut être que je voyage trop vite parfois. J’ai du mal à me poser vraiment. Comme disait Estelle, est ce que ce ne serait pas lié au désir de consommation, d’aller vite, etc. D’un autre côté, je voyage déjà plus lentement que l’immense majorité des gens. Je ne sais pas trop qu’en penser. Avec Couchsurfing aussi je me fait direct des potes dans la ville ultra rapidement, ce qu’on fait en 1 semaine ou 2 normalement. Après faire plus longtemps que 2 semaines je suis quand même sceptique. Quand j’étais à Léon au Nicaragua je suis resté 2 semaines mais j’ai senti que rester plus je n’aurais pas vécu plus. Après chaque endroit et expérience est différente. Se poser comme elle l’a fait c’est top en vrai, elle vit vraiment à un endroit, encore plus que moi. À San Carlos elle s’est fait de vrai potes !

Elle cite notre discussion sur la zone de confort. Qu’elle aime rester longtemps car elle entre dans sa zone de confort et qu’elle aime bien. Je lui disait que j’aimais en sortir tout le temps. Mais en fait, en prenant du recul, non. C’est juste que je me méprenais sur la définition de zone de confort. C’est une zone dans laquelle on se sent bien. Les gens se sentent bien quand ils sont chez eux, mais perso c’est quand je découvre d’autres choses, quand j’explore, que je satisfait ma curiosité et mon envie de stimulation extérieure. En fait, sortir de ma zone de confort serait de faire ce qu’elle fait : rester un mois au même endroit et en être heureux, finalement. Assez drôle dit comme ça, mais je pense vraiment qu’on touche un truc là.

C’est intéressant parce qu’on est à l’opposé la dessus et après cette discussion chacun de nous s’est dit « mais en fait, et si je voyageais comme elle/lui la prochaine fois ? ».

Viennent ensuite 2 points qui se rejoignent et me font réfléchir : le fait que j’ai appris à profiter de l’instant et le fait que je décide de partir le lendemain. Bon, là j’en ai marre d’être avec des français j’ai besoin d’air, de voir ailleurs, d’être tranquille et de parler espagnol. Mais outre ceci, ces jours ci, comme il y a 3j, je suis plus speed et j’ai perdu ma faculté à profiter de l’instant et je fais des plans. Pourquoi ? Parceque j’ai une deadline avec Jules. C’est tout con mais ça fait de l’effet. Je me rend compte en y réfléchissant, et c’est qqch que j’avais déjà remarqué mais ça confirme bien, que je supporte mal la pression. Même la plus petite pression je reviens avec un esprit en mode « j’ai un objectif à atteindre ». J’ai l’impression de revenir au point de départ, comme si tous les efforts et apprentissages étaient remis à 0. J’ai un esprit ultra centré objectif. Du coup soit je me trouve une vie sans objectif, soit j’apprends à ignorer le stress latent que cela me procure, soit je vis à fond en mode objectif, comme les mecs qui font du commerce en région parisienne… Et qui font un burn out à 35 ans. Bon, on va éviter la dernière option, même si elle est super stimulante. Que faire alors ? Je déménage dans un village de pêcheur de la côte Caraïbe Colombienne et je me prend pas la tête, où je profite de la suite de mon voyage pour travailler la dessus et apprendre à vivre avec un objectif sans pour autant y penser trop. Ça c’est bien. Apprendre à choisir et laisser de côté certaines choses qui m’auraient plût mais tant pis. Comme le fait Manue. Je la respecte de ouf pour ça, j’ai graaaaave du mal moi. J’avais fait des choix déjà, mais je faisais quand même un plan pour la Colombie. Là je vais laisser tomber, profiter de l’instant et vivre. Comme elle me l’a dit « le principal c’est de vivre un truc chaque jour, tant pis si je fais pas tant de choses ». J’étais d’accord de fou avant, parceque j’avais le temps et qu’au final je faisais tout ce que je voulais dans les pays que je traversait. Mais là c’est différent, on passe à un autre level. Discuter avec elle m’a grave rappelé à l’ordre.

Enfin il y a un 3ème point, le fait que je critique parfois les gens qui vont en hostel, que j’en ai un avis très tranché. Elle en donne une réponse partielle juste après : ça lui manque les vrais discussions et non juste les blablas habituels d’auberge de jeunesse. Voilà le truc. Ça me gave ce genre de discussion inutile, et c’est ça avec 90% des gens, du coup je ne fait pas souvent l’effort d’aller vers eux sauf quand vraiment je les sens. Et en fait, j’aimerais beaucoup avoir de vrais discutions mais c’est super dur, du coup je suis frustré en un sens, et le souci c’est que j’ ai du mal à prendre sur moi et je rejette cette frustration sur les gens qui en sont à l’origine. Sauf qu’ils n’y sont pas forcément pour grand chose haha, ils font leur voyage à eux aussi. Elle écrit que j’ai confiance en moi mais que je suis trop tranché sur cette question et que ça cache quelque-chose, pas besoin d’être tranché si tu sais intimement que c’est ce que tu aime, peut importe les autres. Sûrement quelque-chose à prouver ?

Ça me « chiffonne » pour reprendre ses mots parcequ’il y a 1 mois et demi, au Nicaragua sur l’île d’Ometepe j’avais réfléchis à ça et je m’étais trouvé grave apaisé par rapport à ça (article 173).

J’avais l’impression d’avoir laissé mes certitudes pour laisser seulement la confiance mais en fait j’ai encore du travail de ce côté visiblement. Je pense aussi que comme je disais, avec l’objectif de voir Jules c’est comme si je retrouvais toutes les vieilles habitudes. Je n’ai rien à prouver, je fait mon voyage comme je le sens et comme je l’aime, mais un changement ne se fait pas si vite et les vieux réflexes ne se perdent pas en 1 mois. Pour terminer, rien à prouver ne veut pas dire ne pas être sensible aux pressions extérieures pour autant. Typiquement ce matin on a discuté avec Léo et Izibe passait et Leo me dit « haaaa mais en fait tu reste qu’avec des français, baaaaa c’est nul ». Je lui répond d’aller se faire voir et c’est une boutade, mais c’est le genre de phrase anodine qui n’aide pas à se défaire de ce genre de choses. Je ne lui en veut absolument pas je l’aurais très certainement charrié de la même façon.

Bref, une rencontre fort intéressante Manue, qui m’a permis de remettre en question ce que je pensais avoir remis en question avec succès, et m’apporte encore plus.

Je vais manger au restau d’hier et me pose dans le hamac. En mangeant, en regardant l’océan, en faisant une sieste ensuite. Quel plaisir de manger du poisson puis faire une sieste face à l’océan en hamac !

Je rentre chill en passant par le village et en prenant 2-3 photos. Je fais mes affaires, vais pour retrouver les belges du bateau pour aller voir les tortues géantes pondre. J’arrive dans une grande vallée super verte c’est super beau, puis je les vois arriver. En fait le port n’est pas là où je pensais ! Bref, demi tour et on embarque tous les 3 pour 30min de petit bateau dans les vagues qui nous détrempent.

Arrivés au bout de la plage aux tortues, il faut marcher jusqu’à « l’hôtel ». Le mec nous a dit 1h de marche… On mettra 2h45. Petit problème d’estimation du temps à priori. On s’attendait à une belle plage, nous aurons droit à une plage pleine de bois et surtout de déchets plastiques. On croise une rivière et un mec super content de nous aider nous indique où passer pour avoir de l’eau au genoux et non à la taille. Malheureusement il ne voulait pas de photo.

On arrive fatigués et en fait c’est pas un hôtel mais la maison d’un mec avec 2-3 chambres en plus. Pas d’électricité ici. On est passé devant un groupement de maisons qui avaient l’électricité grâce à un groupe électrogène. On est au milieu de rien ici, d’un côté l’océan, de l’autre la forêt. Ces gens vivent vraiment au milieu de rien.

Le gars nous dit qu’il n’y a rien à manger car il fait prévenir 3j à l’avance ! Hein ? Abusé là ! Bon en fait vu que c’est les belges qui avaient prévenus pour eux c’est bon. Pour moi de toute façon il me restait avocat/tomate/fromage que je comptais manger là, todo bien.

On sort a 22h pour aller voir les tortues. On marche 10 minutes puis on tombe sur l’une d’elle qui cherche ou pondre dans le sable. Elle est gi-gan-tesque. Elle doit faire 1m50 de long et 350kg d’après le gars. Ce sont des animaux énormes. Super à l’aise dans l’eau j’imagine, sur terre elles sont clairement handicapées. Étonnant que ces animaux n’aient pas évolué différemment parceque sur terre non seulement elle galère mais elle est ultra vulnérable à n’importe quel animal. Bref, on la regarde en lumière rouge car la lumière blanche va l’éblouir et elle va perdre son orientation.

Ces tortues reviennent chaque année, 4 fois par an dans une saison par intervalles de 2 semaines pour pondre. Sur la plage de 12kms, elle pondent sur 8 et plus particulièrement sur 4 kms. Nous sommes dans la zone de ponte principale.

Ainsi, la tortue sort de l’eau et avance vers la plage sur 30mètres, cherche où elle va mettre ses œufs, creuse un trou avec ses nageoires arrières et pond. Elle reboucher ensuite le trou puis repart. Tout le processus dure entre 1h et 2h. La tortue pond uniquement si elle a été fécondée. Elle pond alors 100 œufs dont 70 à 100 sont des vrais et 30 à 0 sont des faux posés sur le dessus pour que les prédateurs mangent les faux. Parmi les vrais œufs, entre 0 et 50% éclosent. Ainsi, dans le meilleur cas, chaque ponte donne 50 tortues. Dans le pire 0. Disont une moyenne de 25 par ponte. Sauf que ça ne s’arrête pas là : quand elles sortent du sable les tortues doivent rejoindre la mer sous la menace des oiseaux puis se débrouiller sous la menace des poissons. Autant dire que même si 100 bébés tortues sortent de terre par an, il n’y en a pas beaucoup qui atteignent l’âge adulte.

Bref, les tortues sont absolument ouf. Après que notre tortue préféré ai pondu, elle rebouche et galère à se retourner en se débat tant dans tous les sens en envoyant du sable de partout avec ses nageoires. Mais vraiment elle galère de fou, on la voit pleurer, souffler fort, se débattre comme elle peut, c’est une épreuve ultra éprouvante pour elle. On aimerait tellement l’aider, mais va déplacer une coquille de 350 kgs tiens ! On la laisse tranquille et on va en voir d’autres. On en voit une en train de sortir de l’eau tel un gros rocher. Une autre retourne dans l’eau. Une dernière cherche où pondre. Quand on revient, notre amie est partie. Tant mieux. Bon voyage ma belle.

Au niveau de la peau, elle est souple mais on la sent épaisse et irrégulière. Sa carapace par contre est fuselée et ultra lisse. Ses nageoires sont immenses. À priori tous les ans elle fait le voyage aller/retour Colombie/Canada. Ça fait une trotte !

Retour chez le gars et dodo. Coucher à 1h réveil à 5h ça va être dur demain haha !

Bilan : 78 000 pesos soit 18€50

Un commentaire

  1. C’est des tortues luth, pas des tortues géantes

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